ça coule de source

Ce matin à fleur de peau mais en clarté dans mes ombres j'ai su qu'il était venu l'instant d'accepter, de faire dans les embrasures des portes le geste nécessaire.

Les portes s'entrebâillent, s'ouvrent, je marche vers elles, je fais l'effort de poser les doigts sur la poignée, de pousser de la paume, de faire entrer la lumière.Il en est qui doivent se fermer, dans l'effort oui mais sans amertume. Elles mènent vers des pièces où la vie s'est enfuie. La table s'empoussière au fil des heures, des jours, les tasses sont vides.

Ce matin j'ai jeté le bouquet de tulipes qui se sont éteintes après avoir coloré si généreusement ma semaine. Pas de colère, de regrets, le temps passe voilà tout, parfois il donne parfois il emporte. C'est son rôle. Dans chaque lumière il y a le contre jour.Alors un peu triste, douloureusement aussi mais en évidences, j'ai recouvert d'une lettre, d'une voix les fauteuils, j'ai rangé le plateau. Mais parce que j'aime je ne fais pas en silences, en fuites. Je n'ai pu m'empêcher de laisser à l'espagnolette les volets, pour laisser les possibles revenir.

Ce matin j'entre et ferme des portes, préviens les êtres qui y venaient qu'elles vont être closes.

La relation humaine comme une source. L'eau ne peut en jaillir que si elle en sort. C'est un "Nous" qui donne naissance à son rythme, à la force qu'il faut pour qu'elle s'élance, impulsée toujours aussi joliment.

Il est dans le fil d'une soirée, en lisant une phrase un écho qui se fait. Et puis les yeux s'ouvrent le lendemain, regarde le rideau, le chat qui sommeille, les messages glissés dans le nid avec les mêmes certitudes.

Souvenirs sortent tranquillement des tiroirs pointant les gestes que l'on fait habituellement, souvent la peur de dire, pas nécessairement la fierté.

Je prends le téléphone pour entendre les êtres qui m'importe, je vais vers eux, consciente aussi de leurs difficultés, des périodes de galères, des demandes voilées, de leur manière de vivre, de leur rythme. Rassurer, dire je suis là, même dans les silences je te vois, t'entends, pense à toi, toujours. Le respect de l'autre c'est lui dire "tu m'es unique ". Je note les goûts, les couleurs de l'univers, ce quelque chose dans l'âme qui fait que j'aime, que j'ai cette chance là d'avoir croisé.

Oui mais voilà, à force de toujours sourire, acquiescer, me taire, rester en silences pour ne pas brusquer, ennuyer, perdre, je me suis gommée, ne devenant que la silhouette qui sert le thé. La fontaine n'est plus une image, juste un mot sans couleurs, des lettres assemblées.

Ce matin quand une porte s'ouvre une autre se ferme ou se fermera. Pour préserver la fontaine que j'aime tant, l'utilité de sa raison d'être, sa place légitime simplement puisque que l'on s'y ressource, l'on y boit avec délice. Heures habillées en croyances qu'avancer n'est pas se perdre, laisser agoniser et se tarir par manque de courage de lever les yeux, de percevoir, préférant un vestige, une ruine d'une énergie, d'une force

Je suis, je "nous" aime, c'est aussi clair que l'eau de roche et j'y crois encore plus fermement quand mes doigts se glissent dans le flot.